Mesdames et messieurs les journalistes,
Soyez les bienvenus au siège du mouvement le Balai Citoyen. C’est avec un plaisir renouvelé que nous vous recevons à chaque fois pour échanger sur la situation nationale. Nous vous remercions pour ce constant accompagnement qui dénote de l’intérêt que vous accordez à notre organisation.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Le Burkina Faso vit une période difficile de son histoire avec une récurrence quasi hebdomadaire d’attaques à caractère terroriste qui mettent à mal l’intégrité du territoire, la sécurité des personnes et des biens, le développement économique et social ainsi que le vivre-ensemble. Le constat est que personne n’est épargné par ces attaques. Elles affectent les populations sans distinction d’appartenance ethnique, religieuse, de couche ou de classe sociale. Le bilan du nombre de civils et d’éléments des forces de défense et de sécurité (FDS) tués ainsi que les personnes déplacées et enlevées ne fait que s’alourdir. A ces attaques répétées des Hommes Armés Non Identifiés (HANI), s’ajoute la maladie à coronavirus (COVID-19) qui, depuis début mars 2020, est une réalité au Burkina Faso et affecte tous les secteurs socioéconomiques.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Il y a lieu de saluer la mémoire de tous nos compatriotes disparus, victimes du terrorisme et de la COVID-19. Nous compatissons également à la douleur des personnes blessées, hospitalisées et affectées.
De la Gouvernance sécuritaire : la lutte antiterroriste
L’une des caractéristiques des attaques actuelles au Burkina Faso est l’absence de revendications claires permettant d’identifier les auteurs et les causes pour lesquelles ces HANI s’en prennent au Pays de Thomas SANKARA. En face, la réponse du régime au pouvoir est largement en deçà des attentes. Le constat est que depuis cinq (05) ans que le phénomène terroriste a pris corps dans le pays, les FDS rencontrent des difficultés à assumer réellement leur mission de sécurisation du territoire, des personnes et des biens. Même si le budget consacré à la défense et à la sécurité a connu un accroissement significatif ses dernières années, force est de reconnaitre que les capacités opérationnelles de notre Armée demeurent insuffisantes pour garantir la sécurité sur l’ensemble du territoire. La preuve en est qu’au fil des années, outre l’accroissement régulier du nombre de victimes, on assiste de plus en plus à l’augmentation du nombre de localités affectées par l’hydre terroriste. Pourtant, le régime actuel ne se lasse pas de crier à qui veut l’entendre que le « Pays est géré ». Reste à savoir comment il est géré ?
Mesdames et messieurs les journalistes,
Pourquoi cette lenteur à fournir à notre Armée une puissance de feu suffisamment dissuasive pour neutraliser ces HANI ? De notre conviction, le problème n’est ni le courage des hommes de rang ni et de la compétence de nos officiers à dérouler une stratégie de sécurité et de défense adaptée à la situation. Le problème se situe au niveau des moyens (équipement, prime), de l’organisation (déploiement/localisation, nomination/responsabilisation, centre de décision, procédures) et des décisions politiques du régime actuel. En effet, sans s’attarder sur le manque d’anticipation de la situation au niveau de la gouvernance qui caractérise le régime, avec Ousséni COMPOAORE et Cherif SY au commande des Ministères stratégiques de la sécurité et de la défense, il y a lieu aujourd’hui de dénoncer avec la plus grande énergie, les tergiversations concernant notamment la dotation en armement adéquat des FDS. Et paradoxalement, dans le même temps, ce sont des civils appelés « Volontaire pour la Défense de la Patrie (VDP) » qui sont armées.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Les mesures d’encadrement des Volontaires pour la Défense de la Patrie nous semblent insuffisantes. Il ne s’agit pas pour le Balai Citoyen de remettre en cause le principe d’institution des VDP, inspiré d’ailleurs de l’exemple des Comités de Défense de la Révolution (CDR) pendant le Conseil National de la Révolution (CNR) du Camarade Président Thomas SANKARA. Mais, il s’agit de pointer du doigt les modalités actuelles de son opérationnalisation et de son encadrement qui comportent à bien des égards des indices dangereux pour l’avenir et doivent impérativement être revues. A titre d’exemple, la durée de formation de ces volontaires est fixée à « 14 jours » soit deux semaines pour assimiler le maniement des armes, le civisme et le respect des droits humains. Cela ne garantit en rien que ces volontaires puissent se départir de l’esprit de vendetta. D’ailleurs, de nombreuses bavures dans les régions du Sahel, du Centre-Nord et de l’Est par exemple leurs sont attribuées par des organisations de lutte et de défense des droits humains. Tout en reconnaissant que certains VDP abattent un travail remarquable sur le terrain de la lutte antiterroriste, en moins d’un an d’existence, la hiérarchie militaire, devrait impérativement revoir les modalités d’enrôlement et d’encadrement de ces groupes pendant qu’il est encore temps. On ne le dira jamais assez : le problème sécuritaire actuel n’est pas à décrocher de la gouvernance globale du pays : le manque d’anticipation, le laxisme et l’affairisme qui caractérisent le régime.
De la gouvernance économique : les acteurs du régime au cœur de délits économiques
Le débat public actuel est très fourni sur cette question. C’est pourquoi, le Balai Citoyen voudrait, une fois de plus, saisir l’occasion pour se prononcer sur la mal gouvernance qui caractérise le régime de Roch Marc KABORE. Il est véritablement affligeant, qu’un régime post-insurrectionnel puisse s’offrir le luxe d’un tel record de dossiers sales et d’impopularité en très peu de temps. A la suite de l’affaire dite de « charbon fin », dont certaines officines obscures font des pieds et des mains pour étouffer la procédure judiciaire en cours, l’on se rappelle également les folles dépenses du Maire de Ouagadougou Armand Pierre BEOUINDE. Dans une lettre ouverte en date du 26 février 2020 que nous avons adressée aux conseillers municipaux de la commune de Ouagadougou, nous écrivons ceci : « le maire Armand BEOUINDE a engagé la commune dans un véritable gouffre financier en contractualisant en crédit-bail avec la société FIDELIS finances Burkina, l’acquisition de 77 véhicules. La commune devra payer à FIDELIS, chaque mois, un montant de plus de 77 millions FCFA soit un total de 4 milliards 631 millions 158 milles 130 FCFA pour 5 ans. Le comble c’est qu’au bout de ce contrat, les véhicules n’appartiendront pas à la Commune […] » Dans cette transaction, le maire Armand BEOUINDE a des intérêts économiques avec l’entreprise attributaire du marché de véhicules. Quatre de ses proches (son épouse et ses trois enfants) sont actionnaires de l’entreprise Raynal Assurances IARD qui s’occupe de l’assurance de ces 77 véhicules avec une participation financière de 42 millions de F CFA au capital. Par ailleurs, Raynal Assurances détient 10% de parts d’actions de FIDELIS Finances Burkina, société qui pilote l’opération de crédit-bail sous contrat avec la commune.
Comment peut-on demander au peuple de se serrer la ceinture alors que les princes du jour ne montrent pas l’exemple ? L’exemple ne vient-il pas du sommet et l’imitation de la base ?
Le Balai Citoyen, à défaut d’avoir eu une réaction du conseil municipal de la commune de Ouagadougou, exhorte encore une fois les Institutions de contrôles et de répression, notamment l’ASCE-LC, ainsi que la Justice à avoir un regard particulier sur ce dossier qui mobilise des milliards du contribuable.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Pour l’une des rares fois dans ce pays, un ancien ministre membre du parti au pouvoir croupit dans les geôles de la MACO depuis le 26 mai 2020. Il s’agit de Jean-Claude Bouda.
Le Balai Citoyen tient à adresser ses vives félicitations au REN-LAC pour sa constance dans la lutte contre la corruption et dans le cas présent, son abnégation pour la mise en œuvre effective de la loi N°004-2015/CNT du 3 mars 2015 portant prévention et répression de la corruption au Burkina Faso. Il faut casser les boucliers de toute nature qui donnent l’impression que dans la marre des corrompus, les « gros poissons » sont protégés. C’est pourquoi nous nous réjouissions de la procédure en faux et usage de faux en écriture privée, délit d’apparence et blanchiment de capitaux en cours au cabinet d’instruction n°3 du pool économique et financier du Tribunal de grande instance de Ouagadougou contre le citoyen Jean Claude BOUDA.
Tout en observant les réserves liées à la présomption d’innocence de monsieur BOUDA, le Balai citoyen se réjouit tout de même de constater avec l’opinion, que des comptes soient demandés à l’ancien ministre de la jeunesse et de la défense. C’est la première fois que le délit d’apparence est en voie d’être expérimentée au Burkina Faso dans une procédure judiciaire. Et c’est aussi une première que dans une affaire de corruption, la justice reconnaisse à une organisation de la société civile en l’occurrence le REN-LAC, le droit de porter plainte et de se constituer partie civile pour l’intérêt général. Les premières tentatives comme celle par exemple dans l’affaire Ousmane GUIRO, ancien DG des douanes, la constitution de partie civile du REN-LAC avait été rejetée par le juge.
Le Balai citoyen salue ses progrès au niveau de la justice burkinabè et adresse ses félicitations et encouragements aux acteurs intègres de toute la chaine judiciaire qui travaillent avec honneur pour la justice et l’égalité des citoyens devant la loi. Mais comme le dit l’adage, une seule hirondelle ne fait pas le Printemps. Des dossiers de corruption et autres malversations sont légions au Burkina Faso. Certains incriminent même des acteurs de la justice dont des magistrats. Une simple revue de la presse d’investigation ou encore, un regard dans les rapports des institutions de contrôle, les rapports parlementaires, permettent de s’apercevoir de la nécessité pour la justice de faire une œuvre de grande salubrité dans la gouvernance au Faso.
Toutefois, tout en se réjouissant de l’évolution de cette affaire, le Balai Citoyen reste vigilant quant à l’aboutissement de la procédure.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Nous ne saurons terminer cette conférence de presse sans aborder la question des élections et de la politisation de l’administration publique.
De la gouvernance politique : élections et politisation de l’administration publique
En novembre 2020, les burkinabè sont appelés dans les urnes pour des élections couplées présidentielles et législatives. Malgré la situation sécuritaire difficile dans de nombreuses localités du pays, nous estimons que par principe, en tant que démocrates, le calendrier électoral doit être respecté. Par contre, c’est sur les conditions de la tenue de ces élections que la classe politique, ainsi que la société civile et l’ensemble des forces vives de la Nation doivent impérativement se retrouver pour engager des discussions dans l’intérêt supérieur de la Nation. Le Balai Citoyen exhorte le Gouvernement à créer les conditions de ce dialogue national en vue de l’organisation d’élections crédibles et inclusives dans un contexte aussi difficile que celui que nous connaissons. Ne pas tenir les élections à bonne date, reviendrait, d’une part, à capituler face au terrorisme et d’autre part, à ajouter un problème ; créer les conditions d’une crise institutionnelle et un désordre politique.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Le 15 mai 2020, les militants de la cellule MPP du ministère de l’eau et de l’assainissement ont fait un don au profit du personnel dudit ministère. S’il convient de féliciter les donateurs pour leur sens de solidarité manifesté à l’endroit de leurs collègues, c’est surtout un devoir de condamner sans réserve et de dénoncer avec la dernière énergie la politisation de l’administration publique.
En effet, le communiqué publié sur la page Facebook du Ministère le 15 Mai 2020 constitue la preuve que des cellules ou des bureaux politiques sont encore actifs dans de nombreux ministères et autres administrations au mépris du Statut général de la fonction publique dont l’article 44 stipule que : « Le fonctionnaire doit, en toutes circonstances, assurer ses fonctions en toute impartialité et se garder de toutes attitudes discriminatoires à l’égard des usagers du service public ainsi que de tous comportements de nature à faire douter de la neutralité du service public. A ce titre, il est interdit notamment d’organiser des activités politiques ou d’installer dans l’administration publique, de manière formelle ou informelle, des cellules ou toutes formes de représentation à caractère politique ».
C’est pourquoi, le Balai Citoyen appelle au démantèlement sans délai et sans condition de ces cellules et autres bureaux politiques, tous partis confondus, dans les administrations publiques de notre pays.
Mesdames et messieurs les journalistes,
Encore une fois, merci pour votre disponibilité à toujours accompagner notre organisation. Merci de votre présence.
Notre nombre est notre force !
Ensemble, on n’est jamais seul !
Nous vous remercions !
Pour le Balai Citoyen
La Coordination Nationale !